Avocat au Barreau de Grenoble

Pension alimentaire (contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants)

Édité le 08 octobre 2025
par Sébastien Klainberg-Brousse

Table des matières

1) Définition & fondement légal

La pension alimentaire (juridiquement : contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants) découle de l’obligation de chaque parent de contribuer selon ses ressources, celles de l’autre parent et les besoins de l’enfant (C. civ., art. 371-2). En cas de séparation, le JAF peut fixer une contribution (C. civ., art. 373-2-2). Cette obligation ne cesse pas de plein droit à la majorité : elle perdure tant que l’enfant n’est pas autonome (études sérieuses, insertion professionnelle).

Important : il ne s’agit pas d’une “sanction” du parent qui n’a pas la “garde” ; c’est une répartition des coûts de l’enfant à proportion des moyens de chacun. En résidence alternée, une pension peut quand même être due en cas de disparité de revenus (dès 500 € d’écart entre les parents).

2) Comment le JAF calcule la pension ? (Méthode & critères)

Le juge apprécie au cas par cas, à partir de pièces récentes :

  • Ressources du parent débiteur (salaires, BIC/BNC, revenus réguliers) et charges indispensables (logement, charges courantes) ;
  • Enfants à charge (y compris issus d’autres unions) et fréquence du DVH (résidence alternée / classique) ;
  • Situation de vie (vie seul·e ou en couple partageant les charges).

Pour objectiver les ordres de grandeur, le ministère de la Justice publie un barème indicatif (et un simulateur public) ; ils nient toute automaticité mais aident à la cohérence des décisions.

À noter : les crédits à la consommation sont en général écartés du calcul prioritaire ; la charge de l’enfant prime.

3) Modalités de versement, indexation et révision

  • Versement : virement bancaire recommandé ; d’autres moyens de paiement sont possibles. En résidence alternée, la pension peut être réduite ou nulle, sauf disparité marquée des revenus.
  • Revalorisation annuelle : si la décision prévoit une clause d’indexation (souvent sur l’indice des prix INSEE), le débiteur doit revaloriser spontanément chaque année. Si l’intermédiation financière est en place, la CAF applique elle-même la revalorisation. 
  • Révision (à la hausse/à la baisse) : si revenus/besoins évoluent de façon notable, saisine du JAF (ou convention parentale homologuée en cas d’accord).

 

4) Intermédiation financière (IFPA) & recouvrement

Depuis 2023, l’intermédiation financière des pensions alimentaires (IFPA), gérée par la CAF/ARIPA, s’est généralisée pour sécuriser le paiement (prélèvement du débiteur → versement au créancier, recouvrement en cas d’impayé).

En cas d’impayé :

  • Recouvrement via ARIPA (jusqu’à 5 ans d’arriérés), avances possibles (ASF, voir ci-dessous).
  • Pénal : au-delà de 2 mois d’impayé, l’abandon de famille est constitué (2 ans d’emprisonnement et 15 000 € d’amende). Valable aussi quand la pension transite par l’IFPA.

 

5) ASF (Allocation de soutien familial) : montants & conditions (2025)

Si vous élevez seul(e) l’enfant et ne percevez pas (ou partiellement) la pension, la CAF peut verser l’ASF :

  • Montant de base : 199,19 € / mois / enfant (ASF différentiel = complément pour atteindre 199,19 € si pension < 199,19 €).
  • Autres cas (enfant recueilli) : 265,51 € / mois / enfant.
  • Versement provisoire possible pendant 4 mois sans décision, sous réserve d’engager des démarches. Les montants sont réévalués périodiquement.

6) Majeur : à qui verser ? jusqu’à quand ?

La pension peut se poursuivre après 18 ans tant que l’enfant n’est pas autonome financièrement (poursuite d’études sérieuses, formation, recherche d’emploi effective). L’autonomie s’apprécie concrètement : existence de revenus stables et suffisants (CDI, apprentissage bien rémunéré, etc.), capacité à assumer seul ses charges courantes ; à l’inverse, des jobs étudiants ponctuels ne suffisent pas, en général, à faire cesser l’obligation. En cas de doute ou de désaccord, il faut saisir le JAF : ni le parent débiteur ni le parent créancier ne peuvent décider unilatéralement de l’arrêt.

Bénéficiaire du versement. Par défaut, la pension demeure versée au parent chez qui vit l’enfant majeur (ou qui en assume principalement les frais). Le versement direct entre les mains du majeur est possible :

  • par accord des parents, si l’enfant ne vit plus chez l’autre parent, ou
  • sur décision du JAF, qui peut ordonner ce versement direct lorsque les conditions sont réunies. À défaut d’accord ou de décision, le parent créancier reste destinataire.
  • Pièces utiles pour une demande de poursuite, de révision ou de cessation : certificat de scolarité ou de formation, justificatifs de recherche d’emploi (Pôle emploi), contrats de travail et bulletins de paie, budget/charges de l’enfant, attestation d’hébergement (chez un parent / logement autonome), etc. Le JAF peut ajuster le montant, l’indexation et les modalités (ex. prise en charge directe de certains frais, art. 373-2-2).

7) Questions fréquentes (FAQ)

La pension est-elle automatique en résidence alternée ?

Non ; aucune pension alimentaire n’est due si les revenus sont proches. Elle peut être due si l’écart de moyens est important.

Je vis en couple. Doit-il communiquer ses revenus au Juge ?

Non. La pension est fixée au regard des seules ressources du parent débiteur et des besoins de l’enfant (C. civ., art. 371-2 ; 373-2-2). Les revenus du nouveau conjoint/partenaire/concubin ne s’additionnent pas aux vôtres ; en revanche, le fait de vivre en couple peut être pris en compte indirectement parce que certaines charges du foyer sont partagées, ce qui augmente votre capacité contributive. Autrement dit : le Juge n’exige pas la communication des bulletins de salaire du nouveau conjoint ; il peut, en revanche, apprécier la réalité du partage des charges (bail commun, quittances, factures, attestations), et en tenir compte pour fixer la contribution.

C’est la position de la cour de cassation : La dette du débiteur d’aliments est une dette personnelle, dont le montant doit être fixé eu égard à ses ressources et que les revenus du conjoint/concubin/partenaire ne peuvent être pris en considération que dans la mesure où ils réduisaient les charges.

 

Je ne vois plus mes enfants, puis-je arrêter de payer la pension alimentaire ?
Non. L’obligation d’entretien (C. civ., art. 371-2) est indépendante de l’exercice du droit de visite et d’hébergement. Tant que l’enfant n’est pas autonome et qu’une décision ou une convention homologuée prévoit une pension, vous ne pouvez pas cesser unilatéralement de payer. En cas d’arrêt de paiement > 2 mois, vous vous exposez au recouvrement (CAF/ARIPA) et à des poursuites pénales pour abandon de famille (C. pén., art. 227-3).

Peut-on indexer la pension ? Qui calcule ?
Oui ; l’indexation suit l’indice précisé au jugement/convention. Le débiteur calcule chaque année (ou la CAF si IFPA).

Je perçois le chômage, puis-je être dispensé de payer une pension alimentaire ?
Pas automatiquement. L’obligation d’entretien (C. civ., art. 371-2) demeure, même en cas de chômage. Tant qu’une décision ou une convention homologuée fixe une pension, vous devez continuer à la payer. En cas de baisse importante de ressources (allocation chômage, fin de droits, reprise partielle d’activité), la solution est de saisir le JAF pour réviser le montant : le juge peut réduire la pension alimentaire si vos ressources sont faibles. Il peut la fixer à 0 € (constat d’insolvabilité) uniquement si vous percevez le RSA.

Je n’arrive plus à payer : que faire ?
Saisir vite le JAF pour révision. Ne pas “arrêter seul” le paiement ; le risque pénal existe au-delà de 2 mois d’impayé.

Comment estimer le montant avant audience ?
Utilisez le barème indicatif et le simulateur officiels (puis ajustez avec vos pièces). Le juge reste souverain.

La CAF peut-elle m’aider en cas d’impayé ?
Oui : IFPA pour sécuriser et ARIPA pour recouvrer. ASF possible si vous élevez seul(e) l’enfant et que la pension n’est pas versée ou est trop faible.