L'indivision
Accueil » Klainberg-Brousse Avocat : L’indivision
Édité le 13 mars 2022
par Sébastien Klainberg-Brousse
Qu’est-ce que l’indivision ?
L’indivision est la situation juridique dans laquelle plusieurs personnes sont propriétaires d’un même bien. Elles peuvent être propriétaires à parts égales ou inégales.
Par exemple, deux concubins qui achètent ensemble un bien immobilier sont en indivision. Il peut être prévu dans l’acte d’acquisition, que le bien sera acquis à 50/50 mais il peut également être prévu une répartition inégale (60/40, etc). Si rien n’est indiqué dans l’acte, celui-ci est présumé indivis par moitié.
De même, des enfants qui héritent des biens de leurs parents se retrouvent donc indivision sur ces biens.
Comment fonctionne l’indivision ?
Certains actes peuvent être accomplis par un seul des indivisaires, sans l’accord des autres : ce sont les actes conservatoires qui sont définis par la Cour de cassation comme les « actes matériels ou juridiques ayant pour objet de soustraire le bien indivis à un péril imminent sans compromettre sérieusement le droit des indivisaires »
Exemple : faire cesser une voie de fait, faire délivrer un commandement de quitter les lieux en vue d’une expulsion du locataire, etc.
Certains actes peuvent être effectués par la majorité des 2/3 des indivisaires (ou par un indivisaire qui détient 2/3 des parts). Mais dans ce cas, il faut en informer les autres indivisaires à peine d’inopposabilité de l’acte.
Exemple d’actes possibles à la majorité des 23 : donner congé au locataire, conclure un bail d’habitation, réaliser des travaux d’amélioration du bien, vendre des meubles indivis, etc.
S’il n’y a que deux indivisaires (deux concubins qui achètent ensemble) et qu’aucun ne détient 2/3 des droits, il faudra l’unanimité.
Certains actes nécessitent l’unanimité : ce sont les acte les plus graves, comme la vente du bien indivis (à l’exclusion des meubles), l’inscription d’une hypothèque, etc.
Comment sortir de l’indivision ?
Le Code civil prévoit que nul ne peut être contraint de rester en indivision.
Soit le bien est vendu et le prix de vente partagé à hauteur des droits de chacun dans le bien.
Soit l’un des coindivisaires rachète la part de celui qui ne veut plus être en indivision.
Soit, en cas de mésentente, de blocage, il faut saisir le tribunal judiciaire pour provoquer, forcer le partage.
J’ai remboursé seul les échéances du crédit immobilier (ou j’ai payé plus) alors que l’acte indique que nous sommes propriétaires à 50/50. Vais-je pouvoir récupérer la totalité de ce que j’ai payé ou à proportion de ce que j’ai payé ?
Cette question donne lieu à une jurisprudence abondante. Il faut distinguer plusieurs situations.
Si vous êtes pacsés : il faut distinguer selon le régime choisi (indivision ou séparation de biens).
Si vous êtes pacsés sous le régime de l’indivision, l’article 515-5-1 du code civil dispose que lesbiens acquis ensemble ou séparément sont réputés indivis par moitié, sans recours de l’un des partenaires contre l’autre au titre d’une contribution inégale.
La réponse est claire : le partenaire qui a réglé la totalité des mensualités ou une part plus importante n’a aucun recours contre l’autre. Au moment du partage du bien, celui-ci sera partagé à 50/50.
Si vous êtes pacsés sous le régime de la séparation de biens, la réponse est apportée par la Cour de cassation dans un arrêt du 27 janvier 2021. Elle a jugé que les remboursements d’emprunt effectués par un partenaire en proportion de ses facultés contributives participaient de l’exécution de l’aide matérielle entre partenaires. Le partenaire ne peut donc prétendre bénéficier d’aucune créance à ce titre.
En clair, si vous gagnez deux fois plus que votre partenaire et que vous réglez les mensualités à hauteur de deux fois plus que l’autre, vous demeurez propriétaires à 50/50.
Il vous faudra donc démontrer que votre participation au remboursement de l’emprunt l’a été bien au-delà de vos facultés financières : par exemple, vous gagnez deux fois plus que l’autre partenaire, mais vous avez payé trois plus que l’autre.
Si vous n’êtes pas pacsés, mais concubins : il faut distinguer selon que les remboursements d’emprunt sont effectués pour le logement de la famille ou non et si c’est pour le logement de la famille, il faut distinguer la période pendant la vie commune ou après la séparation.
Remboursement d’emprunt pour le logement de la famille, pendant la vie commune, lorsque le remboursement d’emprunt porte sur le logement de la famille : si l’un des concubins assume le remboursement de l’emprunt pendant que l’autre paye les autres charges de la vie courante, la cour de cassation en a déduit, dans plusieurs arrêt (13 janvier 2016 et 7 février 2018 notamment), une volonté commune de partager les dépenses de la vie courante. Elle juge donc qu’il n’y a pas lieu à établissement de comptes entre les concubins, qui demeurent propriétaires à 50/50.
Après la séparation des concubins : il arrive fréquemment que l’un des concubins demeure dans le bien après la séparation et prenne en charge la totalité du remboursement de l’emprunt, pendant un certain temps, jusqu’à la vente du bien ou le rachat de parts.
Nécessairement, dans cette situation, il n’y a plus de volonté commune de partager les dépenses de la vie courante et le remboursement d’emprunt effectué par un seul des concubins, donne lieu à indemnité.
En revanche, si le remboursement d’emprunt ne porte pas sur le logement de la famille, la Cour de cassation a jugé dans plusieurs arrêts (7 juin 2006, 20 janvier 2010, 14 avril 2021) que le remboursement d’un emprunt souscrit pour l’acquisition d’un bien immobilier indivis constitue une dépense de conservation qui donne lieu à indemnité.